Hello 🙂 Le mois de juin est déjà presque terminé et je ne l’ai pas vu passer : plongée dans des œuvres littéraires je voyage dans l’espace et le temps, confortablement installée au soleil. Ce temps me permet de m’immerger dans mes bouquins au point d’être souvent en questionnement. Aujourd’hui, je vous invite à découvrir l’interview de Guillaume Montel, auteur de Routine Epsilon (Le Cycle d’Hélios : I) que je remercie chaleureusement pour le temps qu’il m’a accordé.
Bonjour Guillaume, et merci d’avoir accepté cette interview. J’ai été captivée par Routine Epsilon, premier tome de votre trilogie Le Cycle d’Hélios. Ce roman dense, immersif et intelligent a su me surprendre malgré mes nombreuses lectures SF. Commençons si vous le voulez bien…
Votre rapport à l’écriture
1. Qu’est-ce qui vous a donné envie d’écrire Le Cycle d’Hélios ?
Y a-t-il eu un déclic particulier, ou cette histoire vous accompagnait-elle depuis longtemps ?
L’envie d’écrire était dormante, car j’ai toujours éprouvé le besoin de créer. Mais c’est un rêve qui a tout déclenché pour Le cycle d’Hélios. Ou plutôt, un cauchemar où une station spatiale se retrouvait assaillie par une horde de zombies, et où je me retrouvais seul à la surface, avec cette sensation qu’une aventure hors du commun m’attendait. Mais le plus singulier dans ce rêve, c’était la fin, où une voix off disait : « Cela ferait une super série« . Le soir même, j’ouvrais Word pour placer les premières fondations de mon roman.
2. Avant d’écrire Routine Epsilon, aviez-vous déjà exploré d’autres formes d’écriture ? Quels apprentissages ou expériences vous ont préparé à construire un univers aussi dense et structuré que celui d’Hélios ?
Depuis tout jeune j’expérimente à travers divers médias. Vers mes 16 ans j’ai commencé l’écriture d’un roman, une fanfiction du jeu Fallout, mais ce n’est pas allé très loin ! Joueur dans l’âme, il m’arrive aussi de concevoir des scénarios sur des jeux de société comme Zombicide, où je m’amuse beaucoup sur la rédaction des textes d’ambiance ! Mais je crois que c’est ma passion pour la science-fiction, à travers la littérature, mais aussi les films et les jeux vidéos, qui m’a donné le goût des univers complexes. Tout cela m’imprègne depuis toujours, c’est mon petit monde intérieur.
3. Comment s’est déroulé le processus d’écriture de Routine Epsilon ?
Vous êtes-vous imposé une méthode, un rythme précis ? Ou avez-vous laissé l’inspiration vous guider ?
Le processus était pour le moins chaotique ! Je ne me suis imposé aucune routine, aucune règle, sauf celle de me faire plaisir. Je savais à peu près où je voulais aller et je me suis laissé transporter. Au final, cela m’a pris énormément de temps, six ans pour le premier jet de la trilogie complète, avec des gros remaniements en cours d’écriture, des remises en question sur plein d’éléments clés de l’histoire, et beaucoup de nœuds au cerveau pour parvenir à rendre le tout cohérent. Ce n’est clairement pas une méthode optimale, mais je ne regrette rien, car j’ai énormément appris de cette expérience et le résultat final me satisfait pleinement.
Un univers SF riche et complexe
4. Routine Epsilon plonge le lecteur dans un monde post-stellaire très construit, avec ses croyances, ses tensions politiques et ses structures sociales. Combien de temps vous a-t-il fallu pour créer l’univers d’Hélios ?
Il est difficile de répondre à cette question, car mon univers s’est étoffé sur toute la durée de l’écriture. Mis bout à bout, cela représente sans doute plusieurs semaines de travail, étalées sur plusieurs années. En volume, cela représente 40 pages d’annexes et 30 pages de lexique.
5. Les références à des figures mystiques comme Licène, ou encore l’existence du “Saint 1182”, donnent à votre récit une profondeur symbolique très forte. Comment avez-vous abordé la place du religieux et du mystique dans votre roman ?
Les croyances et les religions sont indissociables de nos cultures. Il s’agit d’une constante universelle, en ce qui concerne l’humanité. Je suis parti du postulat que les religions survivraient aux avancées de la science et de la technologie, ce qui m’a amené à inventer une mythologie cosmique, en adéquation avec ce peuple de l’espace. Comme je voulais brouiller les pistes entre science et religion, les figures de cette mythologie sont souvent associées à des phénomènes expliqués par la physique, comme Ptamuth, forgeron des interactions élémentaires (gravité, électromagnétisme…). Mais malgré cet ancrage dans le réel, la part de mystique subsiste. Sur Hélios, il y a autant de façons de croire que d’individus. Car pour moi, la religion est avant tout une question de liberté, un thème fort qui traverse toute la trilogie.
6. Votre roman évoque aussi des thématiques très contemporaines : dérives autoritaires, propagande, quête de sens… Quels messages ou réflexions souhaitiez-vous transmettre à travers cette œuvre ?
Le cycle d’Hélios n’est pas une dystopie, mais il en emprunte quelques codes. Il y a des thèmes que je voulais aborder, car ils sont hélas toujours d’actualité dans notre monde, comme le contrôle voire l’éradication d’un peuple ou de ses coutumes, ce qui dans Le cycle d’Hélios s’illustre par la dictature athée, une longue période de prohibition religieuse. Je parle également des dérives technologiques au nom du progrès, avec le Temple Stellaire et son irrépressible soif de connaissance. Mais ce roman est avant tout une ode à la liberté, en l’incarnation du personnage d’Hannah Freeman. Tout au long du roman, Hannah subit les erreurs de ses pairs jusque dans sa chair. Elle est contrainte, impuissante face au rouleau compresseur d’un système pollué par les idées de quelques individus vaniteux, qui imposent leur vision des choses au plus grand nombre. Pourtant, elle lutte. Pour elle et pour ceux qu’elle aime.
Les personnages : humains, crédibles et attachants
7. J’ai été très touchée par vos personnages, notamment Hannah et Killian. Comment les avez-vous imaginés ? Sont-ils nés d’un schéma narratif ou se sont-ils imposés naturellement à vous ?
Hannah et Killian sont tous les deux inspirés de personnages de jeux vidéos. Hannah m’a été inspirée par Gordon Freeman, un scientifique du jeu Half-Life qui doit faire face à une invasion extraterrestre après une expérience qui tourne au drame. Elle partage d’ailleurs le même nom de famille. Quant à Killian, son nom et son apparence m’ont été inspirés par Killian Darkwater, le maire d’une ville dans le jeu Fallout. Même s’ils partagent des points communs avec leurs alter ego vidéoludiques, ils ont leur personnalité propre qui s’est affinée au cours de l’écriture.
8. Hannah est une héroïne peu stéréotypée : introvertie, observatrice, parfois hésitante… Était-ce important pour vous de créer une figure féminine loin des archétypes ?
J’ai grandi avec des figures féminines inspirantes comme Ellen Ripley dans Alien ou Ellie Sattler dans Jurassic Park, alors il était hors de question de faire d’Hannah un de ces personnages stéréotypés que l’on croise dans beaucoup de romans de SF du XXe siècle ! C’est pour cette raison qu’elle n’est jamais sexualisée et que je ne m’attarde pas sur son apparence. Je ne souhaitais pas non plus tomber dans la facilité en faisant d’elle un personnage invincible. Hannah est sensible, a ses fragilités et même ses démons intérieurs. Mais elle a une volonté de fer et elle se découvre des talents insoupçonnés à mesure qu’elle s’enfonce dans les difficultés.
9. Le duo qu’elle forme avec Killian, plus taiseux et rongé par sa quête de justice, est particulièrement efficace. Leur lien se construit en tension. Comment avez-vous travaillé cette dynamique entre eux ?
L’histoire du Cycle d’Hélios est plutôt sombre, et je voulais que ce duo apporte un peu de lumière. L’opposition entre leurs personnalités est propice aux situations gênantes, et apporte de la légèreté. Dans le premier tome, Hannah n’est pas franchement enjouée à l’idée de fréquenter Killian, elle le fait par nécessité. Mais plus l’histoire avance, plus leurs liens se resserrent. Avec ce duo, mon but était de construire une relation organique, sans forcer les choses. Hannah et Killian s’épanchent rarement sur leurs sentiments respectifs, mais quand ils le font, je voulais que cela soit impactant.
L’immersion musicale : une expérience originale
10. L’une des particularités de votre roman est cette playlist immersive – Murmures de l’Unimonde. Comment vous est venue l’idée de lier musique et lecture ?
Cette idée est arrivée au moment où je travaillais sur la publication de mon tome 1 en autoédition. Je voulais proposer une expérience supplémentaire à mon lectorat et lui permettre d’envisager l’univers d’Hélios sous un autre angle. Mais c’était aussi pour moi une bonne raison de me remettre à la composition musicale, une autre de mes passions.
11. Avez-vous composé cette bande-son vous-même ou collaboré avec des musiciens ? Et comment avez-vous choisi les morceaux en lien avec les scènes du livre ?
J’ai composé cette bande-son seul, avec mes humbles connaissances musicales. Pour cet album, j’ai sélectionné quatre éléments marquants par tome afin d’obtenir des échantillons musicaux qui couvrent toute la trilogie. La plupart font référence à des lieux, comme Couloirs de transit, pour une immersion totale. D’autres sont plus conceptuels et m’ont permis d’explorer de nouveaux horizons, que ce soit en termes de composition, de son ou de technique.
📖 Et après Routine Epsilon…
12. Vous avez précisé que ce premier tome posait des questions sans forcément y répondre. Pouvez-vous nous donner un avant-goût de ce que les lecteurs découvriront dans la suite de la trilogie ?
Bien qu’il y a une continuité dans la trilogie, chaque tome a son identité propre. Le tome 1 pousse sur l’aspect horrifique. Il introduit l’univers, les personnages et l’intrigue tout en gardant une grande part de mystère. Dans le tome 2, « La reprog« , le tableau se fait plus net. On en apprend davantage sur l’origine de la Catastrophe, et pourquoi elle est source de toutes ces tensions idéologiques. Ce qui semblait être un incident isolé va en effet révéler des enjeux bien plus grands. Ce tome 2 prend des allures de thriller politique, ce qui en fait sans doute le plus exigeant de la saga. Il se focalise aussi sur Hannah, ses introspections, ses doutes, sa relation avec Killian. L’horrifique, moins présent, laisse plus de place au mystique. Le troisième et dernier tome, « La voix des oubliés« , change totalement d’ambiance. Je dois admettre que je me suis complètement lâché pour conclure en beauté cette trilogie ! Il y a des batailles épiques, des situations burlesques, mais aussi beaucoup de tension dramatique et quelques passages chargés en émotions.
13. Comment vivez-vous le fait de créer une œuvre en plusieurs tomes ? Est-ce un défi stimulant ou un poids créatif parfois lourd à porter ?
Ni l’un ni l’autre, car j’ai tout écrit d’un seul coup avant de publier le premier tome. Quand j’ai commencé Le cycle d’Hélios, je n’avais pas l’intention de l’éditer ou de le faire éditer, c’était de l’amusement pur ! Ce n’est qu’après avoir terminé le premier jet que j’ai commencé à vouloir faire découvrir mon histoire, et c’est là que j’ai découvert Wattpad. Comme je trouvais mon livre trop long et que je suis personnellement attiré par les petits volumes, j’ai décidé de le scinder en trois tomes. Par chance, l’histoire se déroule en trois grands actes malgré la continuité directe entre chaque tome. Je n’avais donc aucune pression. Au contraire, Wattpad m’a apporté, en plus de belles rencontres, mes premiers lecteurs et lectrices, et quelques avis très précieux qui m’ont poussé à aller au bout d’un rêve latent, celui de publier un livre.
14. Enfin, quels sont vos projets à venir – en dehors du Cycle d’Hélios ? Avez-vous d’autres histoires ou univers en préparation ?
L’autoédition est une belle aventure, mais c’est aussi très énergivore, et je ne suis pas encore prêt pour me lancer dans l’écriture d’un nouveau roman. Cependant, j’ai une histoire qui m’attend, que j’espère mener à son terme un jour. J’ai déjà les bases de l’univers, quelques personnages, et même un résumé des chapitres ! Cette fois il s’agirait d’un one shot de science fantasy mêlant dystopie et magie, avec un message écologique sur l’exploitation et le contrôle des ressources naturelles. J’ai également pour projet de faire un recueil de nouvelles de l’imaginaire, que j’étoffe à mon rythme sur Wattpad sous le titre « Échos du possible » pseudo « crocus01« , pour celles et ceux que ça pourrait intéresser.
Portrait de lecteur
15. Y a-t-il des auteurs ou des œuvres de science-fiction qui ont marqué votre parcours de lecteur et influencé votre écriture ? Quels univers vous ont particulièrement inspiré dans la construction du vôtre ?
Beaucoup ! Le premier film Alien et les nouvelles de Lovecraft n’y sont pas pour rien dans l’ambiance angoissante d’Hélios. Il y a aussi du Star Wars dans l’esthétique de la station et des batailles terrestres ou spatiales. Des livres comme Les guerriers du silence de Pierre Bordage ou encore Dune de Franck Herbert m’ont également marqué par leur profondeur et leur inventivité. Ces auteurs mettent en scène des systèmes géopolitiques tentaculaires dominés par la violence, les intrigues et les trahisons, chose que l’on retrouve de manière plus mesurée dans Le cycle d’Hélios. Une influence majeure de mon univers est le jeu vidéo Fallout, plus particulièrement les deux premiers opus sortis à la fin des années 90 dont j’ai emprunté l’ambiance rétro futuriste et quelques éléments comme les paladins. Je pourrais aussi citer Le Cycle de Tschaï de Jack Vance qui a influencé mon roman de manière plus diffuse. Il s’agit d’une tétralogie que je relis régulièrement et qui incarne pour moi le livre d’aventure par excellence.
16. Et en tant que lecteur, que recherchez vous dans une œuvre de science-fiction aujourd’hui ?
La surprise, l’originalité. Je veux retrouver mes sensations de lecteur débutant, voyager, m’évader, découvrir des univers hauts en couleur et des intrigues qui me tiennent en haleine jusqu’au bout.
🎤 Pour conclure…
17. Quel message aimeriez-vous adresser à vos lecteurs et lectrices, actuels ou futurs, qui s’apprêtent à franchir les portes de l’Unimonde ?
D’abord un grand merci ! Il n’y a pas de plus grande satisfaction pour un auteur que d’être lu. Si la science-fiction n’a plus de secrets pour vous, Le cycle d’Hélios risque de vous surprendre. Et pour celles et ceux qui voudraient se lancer dans une aventure originale et authentique tout en soutenant un auteur indépendant, n’hésitez pas à jeter un coup d’œil aux informations disponibles sur Amazon (description, quatrième de couverture et extrait gratuit).
Conquise, je m’offre les deux prochains opus, et vous ?
En savoir plus sur Entre Mots et Moustaches
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
Merci pour cette interview très complète.