Interview de Micheline Margotonne-Lise : Le Souffle du Lépidoptère et la promesse d’un deuxième opus

Dans le cadre de mon blog littéraire, j’ai eu le privilège d’interviewer Micheline Margotonne-Lise, auteure du roman de science-fiction post-apocalyptique Le Souffle du Lépidoptère : Chrysalides. Publié en 2025, ce premier tome propose une fresque dystopique où s’entrelacent écologie, politique, inégalités sociales et survie humaine.

Dans cette interview exclusive, la romancière revient sur les origines de son inspiration – entre fonte des glaces, menaces environnementales et effet papillon – et partage sa vision d’un futur où énergies renouvelables, comme l’éolien et le solaire, deviennent vitales pour l’humanité. Elle dévoile également ses choix narratifs, son attachement à des personnages comme Ama, Gowan ou Veeda, ainsi que quelques pistes sur la suite de la saga.

Une rencontre littéraire riche et passionnante, qui éclaire la profondeur de son univers et interroge nos choix actuels face aux crises à venir.

Interview de Micheline Margotonne-Lise

Sur l’origine et l’écriture

1/ Qu’est-ce qui a été le déclencheur de l’écriture de Le Souffle du Lépidoptère ?

J’ai lu un jour ces deux articles de Mikå Mered :

  • L’Océan Arctique, nouvelle autoroute officielle du pétrole
  • Des Français découvrent une molécule à 291 milliards en Arctique

La lecture de ces articles m’a fait réaliser que, à cause du réchauffement climatique, de nouvelles
routes maritimes s’ouvrent en Arctique et qu’il devient possible d’y forer dans des zones
jusqu’alors inaccessibles. J’ai aussi appris que la fonte des glaces révélait des molécules qui y
étaient emprisonnées.
Cela m’a immédiatement amenée à une question : qu’adviendrait-il si nous allions forer là où
c’était impossible auparavant ? N’y a-t-il pas une raison pour laquelle cet accès était jusqu’à
présent bloqué ?
C’est ainsi qu’est née l’idée de ce livre.

2/ Votre parcours professionnel a-t-il influencé votre vision dystopique et scientifique du roman ?

J’ai travaillé pendant des décennies dans une compagnie d’assurance, où j’ai vu la part dédiée
aux catastrophes naturelles augmenter année après année. C’était déjà un thème qui me
préoccupait profondément.
Pour la crédibilité scientifique du projet, j’ai dû me plonger dans la recherche. En effet, je n’ai
absolument aucune formation dans ce domaine : je suis peu douée en mathématiques, en
physique, et mes connaissances en sciences naturelles sont très limitées. J’ai donc compensé en
lisant et en faisant des recherches.
Je lis de la SF d’autrice comme Manon Fargetton (coup de cœur pour son livre : « Dix jours avant
la fin du monde »), Becky Chambers et sa vision positive du futur, et Nnedi Okorafor dont j’ai
adoré le roman : « Le livre de Phénix ».

3/ Le titre évoque une image à la fois poétique et fragile : pourquoi avoir choisi le papillon comme
symbole central ?

J’ai pris au sens strict la métaphore de l’effet papillon, j’ai lu qu’elle a été formulée par le
météorologue Edward Lorenz lors d’une conférence scientifique en 1972, qui posait la question :
« Le battement d’ailes d’un papillon au Brésil peut-il provoquer une tornade au Texas ? »
Ce concept, souvent associé à la théorie du chaos (et que Bernard Werber a également
popularisé lors d’une interview), constitue le fil conducteur de mon roman. L’idée est la suivante :
une action infime, qu’elle soit heureuse ou dramatique, peut avoir des répercussions majeures et
imprévisibles sur la vie d’autres personnes et, par extension, sur la planète.
En filigrane de mon roman, chaque vie est importante, car, qui sait si l’action d’une seule
personne, même celle considérée comme insignifiante (Ex : Harshad considérée comme un
intouchable) ne va pas être à l’origine d’une action, idée qui va sauver la planète.

Sur l’univers et les thématiques

4. Votre roman aborde une multitude de thèmes – écologie, politique, religion, inégalités
sociales… Aviez vous dès le départ cette ambition, ou ces pistes se sont-elles imposées au fil de
l’écriture ?

Les thèmes se sont imposés à moi au fur et à mesure de l’écriture, simplement parce que j’ai
réalisé que tout est lié : la politique et la religion, les inégalités et l’écologie.
Aborder une crise écologique, par exemple, sans considérer ses causes
politiques (réglementation, lobbying), ses conséquences sociales (inégalités face aux
catastrophes) ou ses dimensions éthiques/spirituelles (le rapport de l’humanité à la nature)
rendrait l’histoire superficielle.
Mais je l’avoue : je n’avais pas une idée si ambitieuse en tête au départ.

5. La peste et le Translateur sont deux piliers narratifs très forts. Comment les avez-vous
imaginés, entre science et fiction ?

J’ai trouvé ma source d’inspiration dans des articles sur le Net sur des personnes qui se
font greffer des puces sous la peau, que ce soit pour payer leurs achats ou pour être localisées
en cas de disparition.
J’ai choisi d’extrapoler cette idée : au lieu d’une simple puce, j’ai imaginé un dispositif qui irait
beaucoup plus loin, et qui pourrait unifier la population mondiale grâce au langage.
Quant à la peste, je me suis basée sur la pandémie qui a ravagé l’Europe à l’époque médiévale
en décimant une grande partie de sa population. C’est une maladie qui parle à l’imaginaire de
tous.

6. Les personnages d’Ama, Gowan et Veeda touchent particulièrement les lecteurs. Comment les
avez-vous construits et quelle place occupent-ils pour vous dans le récit ?

Les scientifiques tiennent, je l’avoue, une place centrale dans mon récit. Ils se sont imposés
naturellement, afin de créer une mosaïque du monde : Ama est un mélange d’Afrique et de
Chine, Gowan est un Écossais élevé par un Indien, et Veeda la suivante de Matilda est Afghane.
Leurs origines sont un simple fait, une richesse acceptée sans questionnement, car leur valeur et
leur humanité transcendent d’où ils viennent, et le Translateur les unit.
Ils possèdent des caractères très différents, mais ce qui les rassemble, c’est un
profond questionnement sur eux-mêmes, leurs sentiments, leurs objectifs et la peur de ne pas
laisser de trace dans ce monde.
C’est probablement pour ces raisons qu’ils touchent les lecteurs. Nous sommes tous en quête de
qui nous sommes vraiment, et nous cherchons ce qui pourrait donner un sens à notre vie.

Sur l’éolien et l’énergie

7. Dans votre roman, les éoliennes sont présentées comme une source d’énergie écologique
essentielle pour la survie des communautés. Pourquoi avoir choisi l’éolien, et quelle réflexion
souhaitez-vous susciter sur nos choix énergétiques actuels ?

L’éolien n’est qu’une solution parmi d’autres. Ce monde utilise une panoplie de ressources,
exploitant l’énergie sous toutes ses formes.

L’énergie solaire est partout : elle alimente les véhicules, les armures, et les villages de surface.
Les peintures recouvrant les maisons des travailleurs de surface sont elles-mêmes une source
d’énergie.
Sans parler des usines marémotrices, dont je parle au début du livre, et qui restent, bien sûr, un
moyen puissant de produire de l’électricité.
À travers ce roman, mon objectif est de montrer qu’il existe de nombreux moyens d’obtenir de
l’énergie propre, et que, face à l’urgence, nous n’avons pas d’autre choix que d’y recourir et
d’arrêter de tergiverser.

Sur le processus d’écriture et la suite

8. Votre style est riche et dense, parfois exigeant pour le lecteur. Est-ce un choix délibéré de
privilégier la réflexion à l’action ?

J’ai toujours aimé la philosophie, les ouvrages de développement personnel, la méditation et
le yoga.
Je reconnais que le premier livre est dense car j’y ai installé le contexte et les personnages pour
les tomes suivants. Avec le recul, j’aurais pu le scinder en deux : un opus sur l’effondrement de
l’humanité et un autre sur l’émergence de ce nouveau monde. Il est, de fait, ambitieux et peut
déstabiliser.
Désormais, le monde est en place, les technologies sont établies. L’action sera donc privilégiée
dans les volumes à venir. La réflexion y aura toujours sa place, bien sûr, mais sans que cela
nuise au rythme du récit. Du moins, je l’espère.

9. La fin du premier tome laisse volontairement des zones d’ombre. Que pouvez-vous nous
révéler sur la suite : Le Souffle du Lépidoptère continuera-t-il à explorer ce monde ou ouvrira-t-il
une nouvelle porte narrative ?

Absolument ! Le récit dévoilera de nouvelles pistes. Il y aura des révélations sur l’endroit où se
trouvent Ama et Gowan, une prise de conscience de Matilda confrontée à la solitude, une mise
en lumière sur Veeda et Jonah, et, surtout, à la montée en puissance d’Isacs l’I.A… et un twist
sur les dernières pages.

10. Matias Sissoko et Idrissa intriguent beaucoup vos lecteurs. Peut-on espérer les retrouver
pleinement dans le deuxième opus ?

Les scientifiques (Ama, Gowan, Harshad) et les militaires (Matias, Idrissa) ont des méthodes et
des philosophies qui s’opposent. Ils utilisent des moyens radicalement différents pour atteindre
leurs objectifs : les uns par la connaissance et l’innovation, les autres par la stratégie et la force.
Pourtant, malgré leurs divergences, ils sont animés par la même ambition : protéger et sauver les
derniers humains. Ce sont ces chemins opposés, mais qui convergent vers un unique objectif
vital, qui je trouve apportent tension et richesse à l’histoire.
Donc, oui, Matias et Idrissa seront présents dans ce second tome et vont évoluer chacun à leur
façon. Le premier remettra en question sa fidélité aux E.A.U., la seconde redécouvrira des
émotions qu’elle pensait disparues.

11. Vous écrivez que l’écriture a toujours été votre « amie fidèle, exigeante, souvent pénible ».
Qu’est-ce que ce roman vous a appris sur vous-même en tant qu’autrice ?

J’ai écrit mon premier roman, une romance se déroulant en Nouvelle-Zélande, vers l’âge de 14-
15 ans. J’avais passé des heures à me documenter, car, déjà à cette époque, j’accordais une
importance capitale à la crédibilité pour immerger le lecteur.
Un jour de rage, mon père a détruit les 250 pages de ce livre, entièrement rédigé à la main, car je
ne possédais pas d’ordinateur à l’époque. Après cette perte, je suis restée des années sans
écrire, ressentant un vide béant et un profond mal-être.
Une thérapie m’a permis d’admettre que je voulais et que j’étais capable d’écrire. De 2010 à
2018, j’ai suivi des ateliers chez Aleph Écriture.
En 2014, j’ai publié mon premier recueil de nouvelles, Du cœur à l’ouvrage. Cet ouvrage fut une
forme de thérapie, un constat fictionné de ce que l’on peut vivre en entreprise et de la place qu’y
prend le travail dans nos vies.
L’écriture m’apprend la patience et la persévérance. J’ai débuté mon roman Chrysalides en 2015,
je l’ai publié en 2020 et réédité en 2025. J’apprends à aller au bout de ma vision, en respectant
mon rythme et les exigences de qualité que je vise pour mes romans.

12. Enfin, quel message aimeriez-vous que vos lecteurs emportent avec eux après avoir refermé
Chrysalides ?

Je souhaite avant tout que mes livres fassent rêver et laissent une trace durable dans l’imaginaire
des lecteurs. Mon objectif est qu’une fois la dernière page tournée, l’on n’oublie pas aussitôt le
contenu, mais qu’il en reste des images fortes, des idées marquantes et des personnages
touchants.
J’aspire également à ce que mes écrits suscitent une réflexion sur les murs que nous érigeons
pour nous différencier les uns des autres. Car, fondamentalement, nous sommes tous des êtres
humains qui rions et souffrons de la même manière.
La tolérance c’est la clé d’un monde en paix.

Micheline Margotonne-Lise
1 er Octobre 2025

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Cette interview avec Micheline Margotonne-Lise nous rappelle combien la science-fiction peut être un miroir de notre présent. Derrière ses personnages et son univers, elle nous invite à réfléchir sur notre rapport à la planète, à l’énergie, mais aussi à la tolérance et à l’humanité.

La promesse d’un deuxième opus ouvre déjà de nouvelles perspectives et attise notre curiosité. En attendant sa parution, je vous invite à rejoindre la discussion :

📚 Participer à notre groupe de lecture autour de Le Souffle du Lépidoptère

💬 Partager vos impressions et théories sur les personnages et l’univers

🌍 Réfléchir ensemble aux thématiques écologiques et sociales soulevées par le roman

Et vous, chers lecteurs : qu’attendez-vous de la suite ? Êtes-vous prêts à replonger dans ce monde en mutation aux côtés de Matilda, Ama, Gowan, Matias et Idrissa ? ✨

Author: Angelique

J’ai créé Entre Mots et Moustaches, un espace chaleureux où se rencontrent ma passion des livres, ma créativité et mon amour des animaux. Chroniqueuse littéraire et bêta-lectrice, j’écris actuellement mon premier roman, que je souhaite publier le 25 avril 2026, une date symbolique pour moi.
Après dix années auprès de mes chevaux, un accident m’a guidée vers un nouveau projet : l’ouverture d’un bar à chats en partenariat avec la SPA et La clé des chats, mêlant café littéraire, bouquinerie et reiki, une philosophie que je pratique au quotidien depuis 2020. Entre nature, randonnées et instants gourmands, je poursuis mon chemin en tissant des liens entre mots, animaux et spiritualité.


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