En ce beau lundi je vous présente un roman reçu dans le cadre de la masse critique Babelio : Les territoires impuissants écrit par Ghizlaine CHRAIBI. Un petit roman qui se savoure, il fait du bien au cœur et à l’âme. Ces quelques pages concentrent la beauté des personnages et rendent un espoir aux relations naissantes, malgré nos différences.
Résumé de l’éditeur
Nezli-Toulaï est la veuve d’un attelage marital mal accordé qui aura duré plus qu’une vie. Une maladie cinglante vient de surcroit condamner tout espoir de récupérer ses années perdues. Par dépit, elle abandonne son appartement et débarque avec une petite valise sur le pas d’une serre, pensant mourir dignement sur le toit de cet immeuble vintage. Eliel, un solitaire trentenaire squatte déjà les lieux. Écrivain et photographe, volontairement retiré de la forêt des Hommes, il ne fréquente que la prostituée du quatrième étage. Va-t-il laisser entrer la vieille dame ? Va-t-elle s’imposer ? Vont-ils un instant tisser ce qui leur aurait tant manqué ? Un fragment de vie fait de complicité filiale réinventée, en compétition tout de même avec la maladie. Une écriture précise, aux sentiments ciselés. Un récit « Nouvelle Vague » cynique et tendre, où les relations humaines sont mises sous microscope.
- Éditeur : MAELSTROM (14 octobre 2022)
- Langue : Français
- Broché : 130 pages
Eliel – 49 ans
Eliel loge sur la terrasse d’un bâtiment classé des années 50, dans un studio en verre. Il vit en ermite et rejoint la surface uniquement pour faire quelques courses. Il aime cet isolement et nous conte sa relation avec la prostituée du quatrième étage, elle a le don de ne pas parler.
Il possède une collection de disque de jazz. Il est photographe, celui du temps des pellicules qu’il prend soin d’économiser et développe ses photographies dans un cagibi en bois, sans fenêtre. Les photos sont silencieuses, elles aussi. Ecrire, écouter de la musique, une vie simple et paisible. Ses manuscrits sont laissés à Enzo qui se charge de tout et toujours sans la présence de l’auteur.
Nezli-Toulaï
Une femme qui n’aime pas son prénom, de nature timide et délicate. Enfant, elle était effacée, elle se sentait coupable d’être née.
« Nezli-Toulaï ou comment secourir autrui alors qu’on est en train de se noyer soi-même… »
Quelques mois après le décès de son mari, Nezli-Toulaï doit quitter son appartement qui revient de droit à ses beaux-frères. Une femme attachante qui dévoile ses années d’enfance et de vie maritale. Avant de quitter ce lieu, elle apprend qu’elle est atteinte d’une leucémie aigue.
« Sa décision était prise : vivre les quelques mois qui lui restaient hors des circuits médicaux. Advienne que pourra. Elle ne remettrait pas son corps à la science. »
Rencontres
Eliel se retrouve face à cette femme, si frêle et autoritaire à la fois devant son habitat, qu’il découvre méticuleuse et ordonnée. Pourtant, Eliel, bien malgré lui peut-être, prend soin de Nezli-Toulaï et respecte cette petite femme qui bouleverse ses habitudes. Elle le pousse dans son projet et aucun n’évoque le passé, c’est la règle.
Le lecteur observe les liens invisibles qui se tissent entre ces deux personnages que la vie a déposé sur la même terrasse. Et puis nous découvrons aussi Shaoula, l’adorable (ancienne) voisine de Nezli-Toulaï qui vient lui déposer quelques affaires dont ses sacs de tricot.
Entre petites disputes et crises de fou-rire, la vie s’écoule sur le toit terrasse et Eliel ne comprend pas la détresse respiratoire, de plus en plus fréquente chez Nezli. Ils parlent de musique, des projets d’Eliel, de crochet. Ensemble, ils apportent aussi nourriture et vêtements aux sans domicile du cimetière anglican attenant à la bâtisse.
Sentiments
Des personnages attendrissants, généreux, dans une relation qui semble avoir toujours existé. Emportée par ma lecture j’en oubliais la réalité. L’état général de Nezli se dégrade sous le regard impuissant d’Eliel qui reste auprès d’elle, pour la compagnie et tout ce dont elle pourrait avoir besoin. Cette magnifique aventure a-t-elle une fin ? Un fragment de vie devenu si réelle sous la plume de Ghizlaine Chraibi que la lecture est addictive, j’aime ces personnages que j’admire d’assez loin pour éviter de les envahir. Lire leur histoire, c’est un peu comme les espionner, ai-je été invitée ? Probablement.
Nezli-Toulaï n’aime pas son prénom qui pourtant restera dans les mémoires. Elle a ce pouvoir, celui de vous regarder sans détour, de vous montrer le chemin, celui qu’elle n’a pas eu la possibilité de choisir. Nezli-Toulaï est telle que les anciens, ceux dont nous écoutons les histoires d’un autre temps, celui du cœur et du respect de la vie.
Je remercie Babelio de m’avoir fait parvenir ce roman. Un énorme coup de cœur que je conseille à tous les lecteurs.
Biographie de l’auteur
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Une lecture qui a l’air très humaine…
Tout à fait et qui fait un bien fou 🙂 Je suis sortie de ma zone de confort, mais je suis ravie.
ça fait du bien parfois !